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Contexte Les sciences sociales, les sciences environnementales et l’informatique s’intéressent depuis plusieurs décennies aux usages des outils, du langage et des représentations cartographiques : pourquoi et comment les acteurs produisent et utilisent-ils des cartes et des systèmes d’information géographique (SIG) ? Dans quelle mesure les relations de pouvoir structurent-elles les modes d’élaboration et les usages sociaux des cartes et des SIG ? Ces approches, qualifiées par les géographes anglophones de « cartographie critique » et prolongées dans le sous-champ des « SIG critiques », cherchent à analyser le contexte socio-politique et les processus sociaux par lesquels les cartes sont produites et mobilisées, ainsi que les intérêts, souvent implicites, qui s’y cachent. Le succès des géovisualisations sur Internet et l’émergence de nouvelles façons de lire ou d’écrire l’espace grâce au tournant numérique font aujourd’hui renaître les mythes de l’objectivité des cartes. Si ces croyances ne résistent pas à l’analyse critique, elles en complexifient la mise en œuvre et ouvrent de multiples perspectives de recherche qui nécessitent de nouvelles alliances disciplinaires (avec les STS ou les humanités numériques, par exemple). Objectifs scientifiques de l'école L'école thématique a un triple objectif :
La complexité croissante des modes de fabrique cartographique et la dilution des outils géographiques dans l’ensemble des technologies et pratiques numériques peut sans doute expliquer pourquoi l’on assiste comme l’observe M. Goodchild [1] à une marginalisation des approches critiques dans le domaine de la géomatique. Distinguer les fonctions, rôles, effets des outils géospatiaux dans l’entrelacs des pratiques nécessite en effet un renouvellement conceptuel que cette école thématique propose d’amorcer. Les chercheurs et chercheuses en sciences de l’information géographique qui relèvent de l’INSHS, l’INS2I et de l’INEE (les trois tutelles du GDR CNRS MAGIS) ont alors toute leur place dans ces approches critiques car comme le souligne Denis Wood [2], elles doivent se développer à partir des individus « insiders », c’est-à-dire à la fois les chercheurs, ingénieurs et praticiens pleinement impliqués dans le développement de ces technologies et ceux qui sont au cœur de leur diffusion. Le format d’école thématique apparait alors comme particulièrement opportun pour les réunir.
La géomatique occupe en effet une place centrale dans le travail quotidien d’un nombre croissant de chercheurs et chercheuses, tant dans les disciplines historiquement concernées par l’analyse territoriale (géographie, archéologie, histoire…), que dans les disciplines pour lesquelles la localisation des phénomènes est essentielle (écologie, sociologie, études environnementales au sens large…). Il existe une demande latente, de la part de ces praticien·ne·s de la géomatique, pour comprendre les dimensions politiques de ces outils, afin de déceler les biais d’analyse et les « effets d’instruments » de leurs outils de travail quotidien. Au-delà des objectifs strictement scientifiques énoncés plus haut, l’un des objectifs de l’école thématique est donc de contribuer à favoriser un usage informé et critique des outils géomatiques dans des collectifs de recherche. Il semble aujourd’hui nécessaire d’étendre la sphère d’analyse de ce public potentiel aux nouveaux paradigmes informatiques qui impactent les sciences de l’information géographique (données massives, apprentissage profond, ville intelligente... tout en les déconstruisant comme discours prédictifs et normatifs), en contribuant au renouvellement de la posture critique des sciences humaines. Dès lors, seule l’association d’une critique informée par la pratique et d’une pratique guidée par la critique peut permettre de d’accompagner l’émergence d’une communauté francophone de recherche qui participe pleinement ce renouvellement tant d’un point de vue épistémologique que méthodologique. Les postulats de cette proposition reposent donc sur l’idée qu’un tel aggiornamento ne peut s’opérer que par une immersion dans les données, les algorithmes et les situations de terrain. C’est ce que le géographe américain Mathew Wilson appelle « doing critical GIS » [3]. Aussi, le format d’école thématique semble particulièrement opportun pour mener l’ambition à la fois théorique et pratique de CRITIGIS. Public concerné - Prioritairement : public académique (statut chercheur, enseignant-chercheur, ingénieur, jeune chercheur doctorant ou post-doc) de cartographes, géomaticien·ne·s, informaticien·ne·s, data-scientists et thématicien·ne·s (démographie, histoire, sociologie…) qui manipulent des données géographiques, observent les usages de l’information géographique ou développent des applications du géoweb.
Bibliographie [1] Goodchild M. (2014). Two decades on: critical GIScience since 1993, The Canadian Geographer / Le Géographe canadien, vol. 59, n°1, p. 1-9 . |
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